dimanche 19 décembre 2021

Cours n° 15 : Texte argumentatif IV Simone Weil et le droit à l'avortement (1974)

« Aucune femme ne recourt de gaîté de cœur à l’avortement » 

Simone Veil, 26 novembre 1974

Simone Veil à la tribune de l’Assemblée nationale en 1974.


Le discours de Simone Weil sur l'IVG à l'assemblée en 1974
: https://www.youtube.com/watch?v=45MOc6PYoY8

Le discours est retranscris à cette adresse : 

https://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/histoire/grands-discours-parlementaires/simone-veil-26-novembre-1974


Simone Veil à la tribune de l’Assemblée nationale en 1974.

Simone Veil, rescapée de la Shoah, est ministre de la Santé le 26 novembre 1974 lorsqu’elle présente devant l’Assemblée nationale le projet de loi sur la dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse (IVG). 
Le débat qui suivit fut particulièrement intense puisqu’il dura 25 heures au total. Simone Veil fut la cible d’associations de droite et d’extrême-droite anti-avortement qui manifestèrent devant le Palais Bourbon. 
Le projet de loi fut adopté par 284 voix « pour » et 189 « contre » le 20 décembre 1974 grâce au soutien de l’opposition de gauche.


Mme Simone Veil, ministre de la santé. Monsieur le président; mesdames, messieurs; si j'interviens aujourd'hui à cette tribune, ministre de la santé, femme et non-parlementaire, pour proposer aux élus de la nation une profonde modification de la législation sur l'avortement, croyez bien que c'est avec un profond sentiment d'humilité devant la difficulté du problème, comme devant l'ampleur des résonances qu'il suscite au plus intime de chacun des Français et des Françaises, et en pleine conscience de la gravité des responsabilités que nous allons assumer ensemble.

Mais c'est aussi avec la plus grande conviction que je défendrai un projet longuement réfléchi et délibéré par l'ensemble du Gouvernement, un projet qui, selon les termes mêmes du Pré­sident de la République, a pour objet de « mettre fin à une situation de désordre et d'injustice et d'apporter une solution mesurée et humaine à un des problèmes les plus difficiles de notre temps ».

Si le Gouvernement peut aujourd'hui vous présenter un tel projet, c'est grâce à tous ceux d'entre vous — et ils sont nombreux et de tous horizons — qui, depuis plusieurs années, se sont efforcés de proposer une nouvelle législation, mieux adaptée au consensus social et à la situation de fait que connaît notre pays.

C'est aussi parce que le gouvernement de M. Messmer avait pris la responsabilité de vous soumettre un projet novateur et courageux. Chacun d'entre nous garde en mémoire la très remarquable et émouvante présentation qu'en avait faite M. Jean Taittinger.

C'est enfin parce que, au sein d'une commission spéciale présidée par M. Berger, nombreux sont les députés qui ont entendu, pendant de longues heures, les représentants de toutes les familles d'esprit, ainsi que les principales personnalités compétentes en la matière.

Pourtant, d'aucuns s'interrogent encore : une nouvelle loi est-elle vraiment nécessaire ? Pour quelques-uns, les choses sont simples : il existe une loi répressive, il n'y a qu'à l'appliquer. D'autres se demandent pourquoi le Parlement devrait trancher maintenant ces problèmes : nul n'ignore que depuis l'origine, et particulièrement depuis le début du siècle, la loi a toujours été rigoureuse, mais qu'elle n'a été que peu appliquée.

En quoi les choses ont-elles donc changé, qui oblige à intervenir? Pourquoi ne pas maintenir le principe et continuer à ne l'appliquer qu'à titre exceptionnel ? Pourquoi consacrer une pratique délictueuse et, ainsi, risquer de l'encourager ? Pourquoi légiférer et couvrir ainsi le laxisme de notre société, favoriser les égoïsmes individuels au lieu de faire revivre une morale de civisme et de rigueur ? Pourquoi risquer d'aggraver un mouvement de dénatalité dangereusement amorcé au lieu de promouvoir une politique familiale généreuse et constructive qui permette à toutes les mères de mettre au monde et d'élever les enfants qu'elles ont conçus ?

Parce que tout nous montre que la question ne se pose pas en ces termes. Croyez-vous que ce gouvernement, et celui qui l'a précédé se seraient résolus à élaborer un texte et à vous le proposer s'ils avaient pensé qu'une autre solution était encore possible ?

Nous sommes arrivés à un point où, en ce domaine, les pouvoirs publics ne peuvent plus éluder leurs responsabilités. Tout le démontre : les études et les travaux menés depuis-plusieurs années, les auditions de votre commission, l'expérience des autres pays européens. Et la plupart d'entre vous le sentent, qui savent qu'on ne peut empêcher les avortements clandestins et qu'on ne peut non plus appliquer la loi pénale à toutes les femmes qui seraient passibles de ses rigueurs.

Pourquoi donc ne pas continuer à fermer les yeux ? Parce que la situation actuelle est mauvaise. Je dirai même qu'elle est déplorable et dramatique.

Elle est mauvaise parce que la loi est ouvertement bafouée, pire même, ridiculisée. Lorsque l'écart entre les infractions commises et celles qui sont poursuivies est tel qu'il n'y a plus à proprement parler de répression, c'est le respect des citoyens pour la loi, et donc l'autorité de l’État, qui sont mis en cause.

Lorsque des médecins, dans leurs cabinets, enfreignent la loi et le font connaître publiquement, lorsque les parquets, avant de poursuivre, sont invités à en référer dans chaque cas au ministère de la justice, lorsque des services sociaux d'organismes publics fournissent à des femmes en détresse les renseignements susceptibles de faciliter une interruption de grossesse, lorsque, aux mêmes fins, sont organisés ouvertement et même par charter des voyages à l'étranger, alors je dis que nous sommes dans une situation de désordre et d'anarchie qui ne peut, plus continuer. (Applaudissement sur divers bancs des républicains indépendants, de l'union des démocrates pour la République, des réformateurs, des centristes et des démocrates sociaux et sur quelques bancs des socialistes et radicaux de gauche.)

Mais, me direz-vous, pourquoi avoir laissé la situation, se dégrader ainsi et pourquoi la tolérer ? Pourquoi ne pas faire respecter la loi ?

Parce que si des médecins, si des personnels sociaux, si même un certain nombre de citoyens participent à ces actions illégales, c'est bien qu'ils s'y sentent contraints ; en opposition parfois avec leurs convictions personnelles, ils se trouvent confrontés à des situations de fait qu'ils ne peuvent méconnaître. Parce qu'en face d'une femme décidée à interrompre sa grossesse, ils savent qu'en refusant leur conseil et leur soutien ils la rejettent dans la solitude et l'angoisse d'un acte perpétré dans les pires conditions, qui risque de la laisser mutilée à jamais. Ils savent que la même femme, si elle a de l'argent, si elle sait s'informer, se rendra dans un pays voisin ou même en France dans certaines cliniques et pourra, sans encourir aucun risque ni aucune pénalité, mettre fin à sa grossesse. Et ces femmes, ce ne sont pas nécessairement les plus immorales ou les plus inconscientes. Elles sont 300 000 chaque année. Ce sont celles que nous côtoyons chaque jour et dont nous ignorons la plupart du temps la détresse et les drames.

C'est à ce désordre qu'il faut mettre fin. C'est cette injustice qu'il convient de faire cesser. Mais comment y parvenir ?

Je le dis avec toute ma conviction : l'avortement doit rester l'exception, l'ultime recours pour des situations sans issue. Mais comment le tolérer sans qu'il perde ce caractère d'exception, sans que la société paraisse l'encourager ?

Je voudrais tout d'abord vous faire partager une conviction de femme — je m'excuse de le faire devant cette Assemblée presque exclusivement composée d'hommes : aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l'avortement. Il suffit d'écouter les femmes. (Applaudissements sur divers bancs de l'union des démocrates pour la République, des républicains indépendants, des réformateurs, des centristes et des démocrates sociaux et sur quelques bancs des socialistes et radicaux de gauche.)

C'est toujours un drame et cela restera toujours un drame.

C'est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s'il admet la possibilité d'une interruption de grossesse, c'est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme.

Nous pensons ainsi répondre au désir conscient ou inconscient de toutes les femmes qui se trouvent dans cette situation d'angoisse, si bien décrite et analysée par certaines des personnalités que votre commission spéciale a entendues au cours de l'automne 1973.

Actuellement, celles qui se trouvent dans cette situation de détresse, qui s'en préoccupe ? La loi les rejette non seulement dans l'opprobre, la honte et la solitude, mais aussi dans l'anonymat et l'angoisse des poursuites. Contraintes de cacher leur état, trop souvent elles, ne trouvent personne pour les écouter, les éclairer et leur apporter un appui et une protection.

Parmi ceux qui combattent aujourd'hui une éventuelle modification de la loi répressive, combien sont-ils ceux qui se sont préoccupés d'aider ces femmes dans leur détresse ? Combien sont-ils ceux qui, au-delà de ce qu'ils jugent comme une faute, ont su manifester aux jeunes mères célibataires la compréhension et l'appui moral dont elles avaient grand besoin? (Applaudissements sur divers bancs de l'union des démocrates pour la République, des républicains indépendants et sur quelques bancs des socialistes et radicaux de gauche.)

Je sais qu'il en existe et je me garderai de généraliser. Je n'ignore pas l'action de ceux qui, profondément conscients du leurs responsabilités, font tout ce qui est à leur portée pour permettre à ces femmes d'assumer leur maternité. Nous aiderons leur entreprise ; nous ferons appel à eux pour nous aider à assurer les consultations sociales prévues par la loi.

Mais la sollicitude et l'aide, lorsqu'elles existent, ne suffisent pas toujours à dissuader. Certes, les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes sont parfois moins graves qu'elles ne les perçoivent. Certaines peuvent être dédramatisées et surmontées ; mais d'autres demeurent qui font que certaines femmes se sentent acculées à une situation sans autre issue que le sui­cide, la ruine de leur équilibre familial ou le malheur de leurs enfants.

C'est là, hélas ! La plus fréquente des réalités, bien davantage que l'avortement dit « de convenance ». S'il n'en était pas ainsi, croyez-vous que tous les pays, les uns après les autres, auraient été conduits à reformer leur législation en la matière et à admettre que ce qui était hier sévèrement réprimé soit désormais légal ?

Ainsi, conscient d'une situation intolérable pour l’État et injuste aux yeux de la plupart, le Gouvernement a renoncé à la voie de la facilité, celle qui aurait consisté à ne pas intervenir. C'eût été cela le laxisme. Assumant ses responsabilités, il vous soumet un projet de loi propre à apporter à ce problème une solution à la fois réaliste, humaine et juste.

Certains penseront sans doute que notre seule préoccupation a été l'intérêt de la femme, que c'est un texte qui a été élaboré dans cette seule perspective. Il n'y est guère question ni de la société ou plutôt de la nation, ni du père de l'enfant à naître et moins encore de cet enfant.

Je me garde bien de croire qu'il s'agit d'une affaire individuelle ne concernant que la femme et que la nation n'est pas en cause. Ce problème la concerne au premier chef, mais sous des angles différents et qui ne requièrent pas nécessairement les mêmes solutions.

L'intérêt de la nation, c'est assurément que la France soit jeune, que sa population soit en pleine croissance. Un tel projet, adopté après une loi libéralisant la contraception, ne risque-t-il pas d'entraîner une chute importante de notre taux de natalité qui amorce déjà une baisse inquiétante ?

Ce n'est là ni un fait nouveau, ni une évolution propre à la France : un mouvement de baisse assez régulier des taux de natalité et de fécondité est apparu depuis 1965 dans tous les pays européens, quelle que soit leur législation en matière d'avortement ou même de contraception.

Il serait hasardeux de chercher des causes simples à un phénomène aussi général. Aucune explication ne peut y être apportée au niveau national. Il s'agit d'un fait de civilisation révélateur de l'époque que nous vivons et qui obéit à des règles complexes que d'ailleurs nous connaissons mal.

Les observations faites dans de nombreux pays étrangers par les démographes ne permettent pas d'affirmer qu'il existe une corrélation démontrée entre une modification de la législation de l'avortement et l'évolution des taux de natalité et surtout de fécondité.

Il est vrai que l'exemple de la Roumanie semble démentit cette constatation, puisque la décision prise par le gouvernement de ce pays, à la fin de l'année 1966, de revenir sur des dispositions non répressives adoptées dix ans plus tôt a été suivie d'une forte explosion de natalité. Cependant, ce qu'on omet de dire, c'est qu'une baisse non moins spectaculaire s'est produite ensuite et il est essentiel de remarquer que dans ce pays, où n'existait aucune forme de contraception moderne, l'avortement a été le mode principal de limitation des naissances. L'inter­vention brutale d'une législation restrictive explique bien dans ce contexte un phénomène qui est demeuré exceptionnel et passager.

Tout laisse à penser que l'adoption du projet de loi n'aura que peu d'effets sur le niveau de la natalité en France, les avortements légaux remplaçant en fait les avortements clandestins, une fois passée une période d'éventuelles oscillations à court terme.

Il n'en reste pas moins que la baisse de notre natalité, si elle est indépendante de l'état de la législation sur l'avortement, est un phénomène inquiétant, à l'égard duquel les pouvoirs publics ont l'impérieux devoir de réagir.

Une des premières réunions du conseil de planification que présidera le Président de la République va être consacrée à un examen d'ensemble des problèmes de la démographie française et des moyens de mettre un frein à une évolution inquiétante pour l'avenir du pays.

Quant à la politique familiale, le Gouvernement a estimé qu'il s'agissait d'un problème distinct de celui de la législation sur l'avortement...

M. Pierre-Charles Krieg. Et financier !

Mme le ministre de la santé. ... et qu'il n'y avait pas lieu de lier ces deux problèmes dans la discussion législative.

Cela ne signifie pas qu'il n'y attache pas une extrême importance. Dès vendredi, l'Assemblée aura à délibérer d'un projet de loi tendant à améliorer très sensiblement les allocations servies en matière de frais de garde et les allocations dites d'orphelin, qui sont notamment destinées aux enfants des mères célibataires. Ce projet réformera, en outre, le régime de l'allocation maternité et les conditions d'attribution des prêts aux jeunes ménages.

En ce qui me concerne, je m'apprête à proposer à l'Assemblée divers projets. L'un d'entre eux tend à favoriser l'action des travailleuses familiales en prévoyant leur intervention éventuelle au titre de l'aide sociale. Un autre a pour objet d'améliorer les conditions de fonctionnement et de financement des centres maternels, où sont accueillies les jeunes mères en difficulté pendant leur grossesse et les premiers mois de la vie de leur enfant. J'ai l'intention de faire un effort particulier pour la lutte contre la stérilité, par la suppression du ticket modérateur pour toutes les consultations en cette matière. D'autre part, j'ai demandé à l'I. N. S. E. R. M. de lancer, dès 1975, une action thématique de recherche sur ce problème de la stérilité qui désespère tant de couples.

Avec M. le garde des sceaux, je me prépare à tirer les conclusions du rapport que votre collègue, M. Rivierez, parlementaire en mission, vient de rédiger sur l'adoption. Répondant aux vœux de tant de personnes qui souhaitent adopter un enfant, j'ai décidé d'instituer un conseil supérieur de l'adoption qui sera chargé de soumettre aux pouvoirs publics, toutes suggestions utiles sur ce problème. Enfin et surtout, le Gouvernement s'est publiquement engagé, par la voix de M. Durafour, à entamer dès les toutes prochaines semaines avec les organisations familiales la négociation d'un contrat de progrès dont le contenu sera arrêté d'un commun accord avec les représentants des familles, sur la base de propositions qui seront soumises au conseil consultatif de la famille que je préside. (Applaudissements sur plusieurs bancs de l'union des démocrates pour la République et des républicains indépendants.)

En réalité, comme le soulignent tous les démographes, ce qui importe, c'est de modifier l'image que se font les Français du nombre idéal d'enfants par couple. Cet objectif est infiniment complexe et la discussion de l'avortement ne saurait se limiter à des mesures financières nécessairement ponctuelles.

Le second absent dans ce projet pour beaucoup d'entre vous sans doute, c'est le père. La décision de l'interruption de grossesse ne devrait pas, chacun le ressent, être prisé par la femme seule, mais aussi par son mari ou son compagnon. Je souhaite, pour ma part, que dans les faits il en soit toujours ainsi et j'approuve la commission de nous avoir proposé une modification en ce sens ; mais, comme elle l'a fort bien compris, il n'est pas possible d'instituer en cette matière une obligation juridique.

Enfin, le troisième absent, n'est-ce pas cette promesse de vie que porte en elle la femme ? Je me refuse à entrer dans les discussions scientifiques et philosophiques dont les auditions de la commission ont montré qu'elles posaient un problème insoluble. Plus personne ne conteste maintenant que, sur un plan strictement médical, l'embryon porte en lui définitivement toutes les virtualités de l'être humain qu'il deviendra. Mais il n'est encore qu'un devenir, qui aura, à surmonter bien des aléas avant de venir à terme, un fragile chaînon de la transmission de la vie.

Faut-il rappeler que, selon les études de l'Organisation mon­diale de la santé, sur cent conceptions, quarante-cinq s'interrompent d'elles-mêmes au  cours des deux premières semaines et que, sur cent grossesses au début de la troisième semaine, un quart n'arrive pas à ternie, du seul fait de phénomènes naturels? La seule certitude sur laquelle nous puissions nous appuyer, c'est le fait qu'une femme ne prend pleine conscience qu'elle porte un être vivant qui sera un jour son enfant que lorsqu'elle ressent en elle les premières manifestations de cette vie. Et c'est, sauf pour les femmes qu'anime une profonde conviction religieuse, ce décalage entre ce qui n'est qu'un devenir pour lequel la femme n'éprouve pas encore de sentiment profond et ce qu'est l'enfant dès l'instant de sa naissance qui explique que certaines, qui repousseraient avec horreur l'éventualité monstrueuse de l'infanticide, se résignent à envisager la perspective de l'avortement.

Combien d'entre nous, devant le cas d'un être cher dont l'avenir serait irrémédiablement compromis, n'ont pas eu le sentiment que les principes devaient parfois céder le pas.

Il n'en serait pas de même — c'est évident — si cet acte était véritablement perçu comme un crime analogue aux autres. Certains, parmi ceux qui sont les plus opposés au vote de ce projet, acceptent qu'en fait on n'exerce plus de poursuites et s'opposeraient même avec moins de vigueur au vote d'un texte qui se bornerait à prévoir la suspension des poursuites pénales. C'est donc qu'eux-mêmes perçoivent qu'il s'agit là d'un acte d'une nature particulière, ou, en tout cas, d'un acte qui appelle une solution spécifique.

L'Assemblée ne m'en voudra pas d'avoir abordé longuement cette question. Vous sentez tous que c'est là un point essentiel, sans doute le fond même du débat. Il convenait de l'évoquer avant d'en venir à l'examen du contenu du projet.

En préparant le projet qu'il vous soumet aujourd'hui, le Gouvernement s'est fixé un triple objectif: faire une loi réellement applicable ; faire une loi dissuasive ; faire une loi protectrice.

Ce triple objectif explique l'économie du projet.

Une loi applicable d'abord.

Un examen rigoureux des modalités et des conséquences de la définition de cas dans lesquels serait autorisée l'interruption de grossesse révèle d'insurmontables contradictions

Si ces conditions sont définies en termes précis — par exemple, l'existence de graves menaces pour la santé physique ou mentale de la femme, ou encore, par exemple, les cas de viol ou d'inceste vérifiés par un magistrat — il est clair que la modification de la législation n'atteindra pas son but quand ces critères seront réellement respectés, puisque la proportion d'interruptions de grossesse pour de tels motifs est faible. Au surplus, l'appréciation de cas éventuels de viol ou d'inceste soulèverait des problèmes de preuve pratiquement insolubles dans un délai adapté à la situation.

Si, au contraire, c'est une définition large qui est donnée — par exemple, le risque pour la santé psychique ou l'équilibre psychologique ou la difficulté des conditions matérielles ou morales d'existence —, il est clair que les médecins ou les commissions qui seraient chargés de décider si ces conditions sont réunies auraient à prendre leur décision sur la base de critères insuffisamment précis pour être objectifs.

Dans de tels systèmes, l'autorisation de pratiquer l'interruption de grossesse n'est en pratique donnée qu'en fonction des conceptions personnelles des médecins ou des commissions en matière d'avortement et ce sont les femmes les moins habiles à trouver le médecin le plus compréhensif ou la commission la plus indulgente qui se trouveront encore dans une situation sans issue.

Pour éviter cette injustice, l'autorisation est donnée dans bien des pays de façon quasi automatique, ce qui - rend une telle procédure inutile, tout en laissant à elles-mêmes un certain nombre de femmes qui ne veulent pas encourir l'humiliation de se présenter devant une instance qu'elles ressentent comme un tribunal.

Or, si le législateur est appelé à modifier les textes en vigueur, c'est pour mettre fin aux avortements clandestins qui sont le plus souvent le fait de celles qui, pour des raisons sociales, économiques ou psychologiques, se sentent dans une telle situation de détresse qu'elles sont décidées à mettre fin à leur grossesse dans n'importe quelles conditions. C'est pourquoi, renonçant à une formule plus ou moins ambiguë ou plus ou moins vague, le Gouvernement a estimé préférable d'affronter la réalité et de reconnaître qu'en définitive la décision ultime ne peut être prise que par la femme.

Remettre la décision à la femme, n'est-ce pas contradictoire avec l'objectif de dissuasion, le second des deux que s'assigne ce projet ?

Ce n'est pas un paradoxe que de soutenir qu'une femme sur laquelle pèse l'entière responsabilité de son geste hésitera davan­tage à l'accomplir que celle qui aurait le sentiment que la décision a été prise à sa place par d'autres.

Le Gouvernement a choisi une solution marquant clairement la responsabilité de la femme parce qu'elle est plus dissuasive au fond qu'une autorisation émanant d'un tiers qui ne serait ou ne deviendrait vite qu'un faux-semblant.

Ce qu'il faut, c'est que cette responsabilité, la femme ne l'exerce pas dans la solitude ou dans l'angoisse.

Tout en évitant d'instituer une procédure qui puisse la détourner d'y avoir recours, le projet prévoit donc diverses consulta­tions qui doivent la conduire à mesurer toute la gravité de la décision qu'elle se propose, de prendre.

Le médecin petit jouer ici un rôle capital, d'une part, en informant complètement la femme des risques médicaux de l'interruption de grossesse qui sont maintenant bien connus, et tout spécialement des risques de prématurité de ses enfants futurs, et, d'autre part, en la sensibilisant' au problème de la contraception.

Cette tâche de dissuasion et de conseil revient au corps médical de façon privilégiée et je sais pouvoir compter sur l'expé­rience et le sens de l'humain des médecins pour qu'ils s'efforcent d'établir au cours de ce colloque singulier le dialogue confiant et attentif que les femmes recherchent, parfois même inconsciemment

Le projet prévoit ensuite une consultation auprès d'un organisme social qui aura pour mission d'écouter la femme, ou le couple lorsqu'il y en a un, de lui laisser exprimer sa détresse, de l'aider à obtenir des aides si cette détresse est financière, de lui faire prendre conscience de la réalité des obstacles qui s'opposent ou semblent s'opposer à l'accueil d'un enfant. Bien des femmes apprendront ainsi à l’ occasion de cette consultation qu'elles peuvent accoucher anonymement et gratuitement à l'hôpital et que l'adoption éventuelle de leur enfant peut constituer une solution.

Il va sans dire que nous souhaitons que ces consultations soient les plus diversifiées possible et que, notamment, les orga­nismes qui se sont spécialisés pour aider les jeunes femmes en difficulté puissent continuer à les accueillir et à leur apporter l'aide qui les incite à renoncer à leur projet. Tous ces entretiens auront naturellement lieu seule à seule, et il est bien évident que l'expérience et la psychologie des personnes appelées à accueillir les femmes en détresse pourront contribuer de façon non négligeable à leur apporter un soutien de nature à les faire changer d'avis. Ce sera, en outre; une nouvelle occasion d'évoquer avec la femme le problème de la contraception et la nécessité, dans l'avenir, d'utiliser des moyens contraceptifs pour ne plus jamais avoir à prendre la décision d'interrompre une grossesse pour les cas où la femme ne désirerait pas avoir d'enfant. Cette information en matière de régulation des naissances — qui est la meilleure des dissuasions à l'avortement — nous parait si essentielle que nous avons prévu d'en faire une obligation, sous peine de fermeture administrative, à la charge des établissements où se feraient les interruptions de grossesse.

Les deux  entretiens qu'elle aura eus, ainsi que le délai de réflexion de huit jours qui lui sera imposé, ont paru indispensables pour faire prendre conscience  à la femme de ce qu'il ne s'agit pas d'un acte normal ou banal, mais d'une décision grave qui ne peut être prise sans en avoir pesé les conséquences et qu'il convient d'éviter à tout prix. Ce n'est qu'après cette prise de conscience, et dans le cas où la femme n'aurait pas renoncé à sa décision, que l'interruption de grossesse pourrait avoir lieu. Cette intervention ne doit toutefois pas être pratiquée sans de strictes garanties médicales pour la femme elle-même et c'est le troisième objectif du projet de loi : protéger la femme.

Tout d'abord, l'interruption de grossesse ne peut être que précoce, parce que ses risques physiques et psychiques, qui ne sont jamais nuls, deviennent, trop sérieux après la fin de la dixième semaine qui suit la conception pour que l'on permette aux femmes de s'y exposer.

Ensuite, l'interruption de grossesse ne peut être pratiquée que par un médecin, comme c'est la règle dans tous les pays qui ont modifié leur législation dans ce domaine. Mais il va de soi qu'aucun médecin ou auxiliaire médical ne sera jamais tenu d'y participer.

Enfin, pour donner plus de sécurité à la femme, l'intervention ne sera permise qu'en milieu hospitalier, public ou privé.

Il ne faut pas dissimuler que le respect de ces dispositions, que le Gouvernement juge essentielles et qui restent sanctionnées par les pénalités prévues à l'article 317 du code pénal, maintenues en vigueur à cet égard, implique une sérieuse remise en ordre que le Gouvernement entend mener à bien. Il sera mis fin à des pratiques qui ont reçu récemment une fâcheuse publicité et qui ne pourront plus être tolérées dès lors que les femmes auront la possibilité de recourir légalement à des interventions accomplies dans de réelles conditions de sécurité.

De même, le Gouvernement est décidé à appliquer fermement les dispositions nouvelles qui remplaceront celles de la loi de 1920 en matière de propagande et de publicité. Contrairement à ce qui est dit ici ou là, le projet n'interdit pas de donner des -informations sur la loi et sur l'avortement ; il interdit l'incitation à l'avortement par quelque moyen que ce soit car cette incitation reste inadmissible.

Cette fermeté, le Gouvernement la montrera encore en ne permettant pas que l'interruption de grossesse donne lieu à des profits choquants; les honoraires et les frais d'hospitalisation ne devront pas dépasser des plafonds fixés par décision administrative en vertu de la législation relative aux prix. Dans le même souci, et pour éviter de tomber dans les abus constatés dans certains pays, les étrangères devront justifier de conditions de résidence pour que leur grossesse puisse être interrompue.

Je voudrais enfin expliquer l'option prise par le Gouvernement, qui a été' critiquée par certains, sur le non-remboursement de l'interruption de grossesse par la sécurité sociale.

Lorsque l'on sait que les soins dentaires, les vaccinations non obligatoires, les verres correcteurs ne sont pas ou sont encore très incomplètement remboursés par la sécurité sociale, comment faire comprendre que l'interruption de grossesse, soit, elle, remboursée ? (Mouvements divers.) Si l'on s'en tient aux principes généraux de la sécurité sociale, l'interruption de grossesse, lorsqu'elle n'est pas thérapeutique, n'a pas à être prise en charge. Faut-il faire exception à ce principe ? Nous ne le pensons pas, car il nous a paru nécessaire de souligner la gravité d'un acte qui doit rester exceptionnel, même s'il entraîne dans certains cas une charge financière pour les femmes. Ce qu'il faut, c'est que l'absence de ressources ne puisse pas empêcher une femme de demander une interruption de grossesse lorsque cela se révèle indispensable ; c'est pourquoi l'aide médicale a été prévue pour les plus démunies.

Ce qu'il faut aussi, c'est-bien marquer la différence entre la contraception qui, lorsque les femmes ne désirent pas un enfant, doit être encouragée par tous les moyens et dont le remboursement par la sécurité sociale vient d'être décidé, et l'avortement que la société tolère mais qu'elle ne saurait ni prendre en charge ni encourager. (Très bien ! très bien ! sur divers bancs de l'union des démocrates pour la République.)

Rares sont les femmes qui ne désirent pas d'enfant ; la maternité fait partie de l'accomplissement de leur vie et celles qui n'ont pas connu ce bonheur en souffrent profondément. Si l'enfant une fois né est rarement rejeté et donne à sa mère, avec son premier sourire, les plus grandes joies qu'elle puisse connaître, certaines femmes se sentent incapables, en raison des difficultés très graves qu'elles connaissent à un moment de leur existence, d'apporter à un enfant l'équilibre affectif et la sollicitude qu'elles lui doivent. A ce moment, elles feront tout pour l'éviter ou ne pas le garder. Et personne ne pourra les en empêcher. Mais les mêmes femmes, quelques mois plus tard, leur vie affective ou matérielle s'étant transformée, seront les premières à souhaiter un enfant et deviendront peut-être les mères les plus attentives. C'est pour celles-là que nous voulons mettre fin à l'avortement clandestin, auquel elles ne manqueraient pas de recourir, au risque de rester stériles ou atteintes au plus profond d'elles-mêmes.

J'en arrive au terme de mon exposé. Volontairement, j'ai préféré m'expliquer sur la philosophie générale du projet plutôt que sur le détail de ses dispositions que nous examinerons à loisir au cours de la discussion des articles.

Je sais qu'un certain nombre d'entre vous estimeront en conscience qu'ils ne peuvent voter ce texte, pas davantage qu'aucune loi faisant sortir l'avortement de l'interdit et du clandestin.

Ceux-là, j'espère les avoir au moins convaincus que ce projet est le fruit d'une réflexion honnête et approfondie sur tous les aspects du problème et que si le Gouvernement a pris la responsabilité de le soumettre au Parlement, ce n'est qu'après en avoir mesuré la portée immédiate aussi bien que les conséquences futures pour la nation.

Je ne leur en donnerai qu'une preuve, c'est qu'usant d'une procédure tout à fait exceptionnelle en matière législative, le Gouvernement vous propose d'en limiter l'application à cinq années. Ainsi dans l'hypothèse où il apparaîtrait au cours de ce laps de temps que la loi que vous auriez votée ne serait plus adaptée à l'évolution démographique ou au progrès médical, le Parlement aurait à se prononcer à nouveau dans cinq ans en tenant compte de ces  nouvelles données.

D'autres hésitent encore. Ils sont conscients de la détresse de trop de femmes et souhaitent leur venir en aide ; ils craignent toutefois les effets et les conséquences de la loi. A ceux-ci je veux dire que si la loi est générale et donc abstraite, elle est faite pour s'appliquer à des situations individuelles souvent angoissantes ; que si elle n'interdit plus, elle ne crée aucun droit à l'avortement et que, comme le disait Montesquieu « la nature des lois humaines est d'être soumise à tous les accidents qui arrivent et de varier à mesure que les volontés des hommes changent Au contraire la nature des lois de la religion est de ne varier jamais. Les lois humaines statuent sur le bien, la religion sur le meilleur. »

C'est bien dans cet esprit que depuis une dizaine d'années, grâce au président de votre, commission des lois, avec lequel j'ai eu l'honneur de collaborer lorsqu'il était garde des sceaux, a été rajeuni et transformé notre prestigieux code civil. Certains ont craint alors qu'en prenant acte d'une nouvelle image de la famille, on ne contribue à la détériorer. Il n'en a rien été et notre pays peut s'honorer d'une législation civile désormais plus juste, plus humaine, mieux adaptée à la société dans laquelle nous vivons. (Murmures sur divers bancs. — Applaudissements sur de nombreux bancs de l'union des démocrates pour la République, des républicains indépendants et des réformateurs, des centristes et des démocrates sociaux.)

Je sais que le problème dont nous débattons aujourd'hui concerne des questions infiniment plus graves et qui troublent beaucoup plus la conscience de chacun. Mais en définitive il s'agit aussi d'un problème de société.

Je voudrais enfin vous dire ceci : au cours de la discussion, je défendrai ce texte, au nom du Gouvernement, sans arrière-pensée, et avec toute ma conviction, mais il est vrai que personne ne peut éprouver une satisfaction profonde à défendre un tel texte — le meilleur possible à mon avis — sur un tel sujet : personne n'a jamais contesté, et le ministre de la santé moins que quiconque, que l'avortement soit un échec quand il n'est pas un drame.

Mais nous ne pouvons plus fermer les yeux sur les 300000 avortements qui, chaque année, mutilent les femmes de ce pays, qui bafouent nos lois et qui humilient ou traumatisent celles qui y ont recours.

L'histoire nous montre que les grands débats qui ont divisé un moment les Français apparaissent avec le recul du temps comme une étape nécessaire à la formation d'un nouveau consensus social, qui s'inscrit dans la tradition de tolérance et de mesure de notre pays.

Je ne suis pas de ceux et de celles qui redoutent l'avenir.

Les jeunes générations nous surprennent parfois en ce qu'elles diffèrent de nous ; nous les avons nous-mêmes élevées de façon différente de celle dont nous l'avons été. Mais cette jeunesse est courageuse, capable d'enthousiasme et de sacrifices comme les autres. Sachons lui faire confiance pour conserver à la vie sa valeur suprême. (Applaudissements sur de nombreux bancs des républicains indépendants, de l'union des démocrates pour la République, des réformateurs, des centristes et des démocrates sociaux et sur quelques bancs des socialistes et radicaux de gauche.)



Exercice 4  :  travail de préparation à faire à la maison pour préparer une dissertation sur l'IVG (interruption volontaire de grossesse) ou avortement. Êtes-vous favorable à l’avortement ?



Défendez votre opinion (position, thèse)  en trois paragraphes argumentés. 

Introduction (Présentation de la problématique)

a - Thèse
b - Antithèse = objection (contre-argument) et refutation.
c - synthèse = concession, discussion. Consolidation. 

Conclusion : réponse rationnelle à la problématique


Inspirez-vous du dossier ci-dessous pour trouver des arguments fondés sur des données concrètes 

Avortement légal ou clandestin  :
http://sante.lefigaro.fr/actualite/2012/01/19/17053-pres-dun-avortement-sur-deux-dans-monde-est-clandestin

http://www.ceped.org/avortement/fr/chap5/800/chap5-800.html

Statistiques : l'avortement dans le monde 
https://www.ined.fr/fr/tout-savoir-population/memos-demo/fiches-pedagogiques/l-avortement-dans-le-monde/

http://www.svss-uspda.ch/fr/facts/mondial-liste.htm 

Droit à l'avortement 
Simone Veil et le droit à l'avortement : 

https://www.liberation.fr/apps/2017/06/simone-veil-combat-avortement/

http://www.liberation.fr/planete/2016/09/27/acces-a-l-ivg-le-monde-a-mi-chemin_1512538

http://www.liberation.fr/planete/2017/01/28/avec-trump-le-droit-a-l-avortement-est-il-reellement-menace-aux-etats-unis_1544017

Droit à l'avortement en France 
http://ivg.social-sante.gouv.fr/ivg-un-droit-garanti-par-la-loi.html

Avortement à Taiwan : 
http://www.magicmaman.com/,avortements-selectifs-taiwan-instaure-des-mesures-de-controle,2220,2014705.asp

http://taipei.angloinfo.com/information/healthcare/pregnancy-birth/termination-abortion/

Avortement dans le cadre du PVT  
https://pvtistes.net/dossiers/contraception-ivg-avortement-pays-pvt/8/

Avortement et association féministe à Taiwan : 
http://taiwaninfo.nat.gov.tw/news.php?unit=59,78,84,90,182,84&post=60779

Avortement clandestin à Taiwan 
https://www.fidh.org/IMG/pdf/taiwan_fr.pdf

samedi 11 décembre 2021

Cours n° 14 Texte argumentatif III Taubira et le mariage pour tous (2013)

Le 29 janvier 2013, Christiane Taubira prononce un discours mémorable lors de l’ouverture de l’examen du projet de loi sur l’ouverture du mariage et de l’adoption à l’Assemblée nationale. Elle l’avait conclu en citant encore Léon-Gontran Damas : "L'acte que nous allons accomplir est ‘beau comme une rose dont la Tour Eiffel assiégée à l'aube voit s'épanouir enfin les pétales’”... Pour certains, elle est rentrée avec ce discours dans l’histoire, comme Simone Veil en novembre 1974.


https://www.youtube.com/watch?v=CL9JAvwu8U8


Voici le texte du discours de Christiane Taubira en intégralité, tel qu'il a été retranscrit par les personnels de l'Assemblée nationale, avec les interventions des députés, notamment de Jacques Myard.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice.
Dans une maison qui aime tant à citer le doyen Jean Carbonnier, je ne vais pas déroger à la règle. En 1989, à l’occasion des travaux de réflexion sur le bicentenaire de la Révolution française, il définissait le mariage civil comme la « gloire cachée » de celle-ci. Il faisait évidemment allusion aux vifs débats qui ont accompagné l’instauration de ce mariage civil, sa dimension contractuelle, sa durée, c’est-à-dire la possibilité de divorcer. À cette époque, deux religions reconnaissent le divorce, la religion protestante et la religion juive, tandis que la religion catholique, majoritaire, déclare le mariage indissoluble. Le doyen Carbonnier considère donc que le constituant de 1791 a bien accompli une véritable révolution en instaurant le mariage civil. La sécularisation de ce mariage est ainsi consacrée dans la Constitution de 1791.
Le mariage civil porte l’empreinte de l’égalité. Il s’agit d’une véritable conquête fondatrice de la République, dans un mouvement général de laïcisation de la société.
Une telle conquête était importante essentiellement pour ceux qui étaient exclus du mariage à cette époque. Après la révocation de l’édit de tolérance, dit édit de Nantes, en 1685, les protestants ne pouvaient se marier qu’en procédant secrètement avec leurs pasteurs. Ils ne pouvaient pas constituer une famille et leurs enfants étaient considérés comme des bâtards. À partir de 1787, l’édit de tolérance autorise de nouveau les prêtres et les juges à prononcer ces mariages en tant qu’officiers de l’état-civil. Il y a donc une première ouverture, deux ans avant la Révolution, avec cette reconnaissance du pluralisme religieux et la possibilité d’inclure dans le mariage ceux qui en étaient exclus, à savoir les protestants et les juifs. Mais le mariage n’inclut encore que les croyants.
Il exclut aussi des professions, et notamment les comédiens, parce que la religion proclame qu’elle ne saurait reconnaître les pratiques infâmes des acteurs de théâtre. C’est d’ailleurs le comédien Talma qui va saisir la Constituante parce que le curé de Saint-Sulpice refuse de publier les bans de son mariage avec une « mondaine », comme on disait à l’époque. (Sourires.)
Les constituants décident donc d’instaurer un mariage civil et inscrivent dans l’article 7 du titre II de la Constitution de septembre 1791 que le mariage n’est que contractuel et que le pouvoir législatif établira pour tous les habitants, sans distinction, le mode par lequel les naissances, mariages et décès seront constatés et désignera les officiers chargés de constater et d’enregistrer ces actes.
Le mariage civil permet d’inclure des croyants non catholiques, mais il est élargi à tous, c’est-à-dire que tous ceux qui souhaitent se marier peuvent disposer des mêmes droits et doivent respecter les mêmes obligations.
Cette conception du mariage civil, qui porte l’empreinte de l’égalité, est en fait essentiellement une liberté, parce que, dès l’instauration du mariage, le divorce sera également reconnu. Il est écrit dans l’exposé des motifs de la loi de 1792 que le divorce résulte d’une liberté individuelle, dont un engagement indissoluble serait la perte. Puisque le mariage est la liberté des parties et non la sacralisation d’une volonté divine, cette liberté de se marier ne se conçoit qu’avec la liberté de divorcer, et, parce que le mariage va se détacher du sacrement qui l’avait précédé, il pourra représenter les valeurs républicaines et intégrer progressivement les évolutions de la société.
La meilleure manifestation de cette liberté s’exprime par l’article 146 du code civil, qui n’a pas changé depuis son origine, et selon lequel il n’y a pas de mariage sans consentement. Cet article établit donc la pleine liberté de l’un et de l’autre conjoint dans le mariage.
Si l’on se souvient que le mariage a d’abord été une union de patrimoines, d’héritages, de lignées, que l’on passait chez le notaire avant de passer chez le prêtre,…
M. Jacques Myard. Aujourd’hui encore !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
…le fait de reconnaître la liberté de chacun des conjoints est un progrès considérable, aujourd’hui encore inscrit dans le code civil.
Le divorce va donc accompagner très vite le mariage. Il sera prohibé en 1816, dans une ambiance où les courants conservateurs sont dominants et où les libertés, notamment celles des femmes, sont en régression. Il sera rétabli en 1884 par la loi Naquet, là encore dans un mouvement général contraire de laïcisation de la société. L’évolution du mariage porte en effet très fortement la marque de la laïcité, de l’égalité et de la liberté telles que ces valeurs ont évolué dans notre droit et dans notre société (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR), dans une relation diachronique qui a connu parfois de très vives tensions.
M. Jacques Myard. Ce n’est pas le sujet !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
C’est donc dans un mouvement de laïcisation de l’état-civil, des libertés individuelles, de la société en général que le divorce sera restauré en 1884. C’est en effet au cours de cette décennie que d’autres lois de liberté individuelle, telles que la loi sur la presse, les lois relatives à la liberté d’association ou à la liberté syndicale, et bientôt la loi de séparation des églises et de l’État, vont intervenir. Le divorce sera consolidé en 1975 par le rétablissement du consentement mutuel, qui était déjà reconnu en 1792, comme d’ailleurs l’incompatibilité d’humeur.
Le mariage, accompagné du divorce, reconnaît donc la liberté, y compris celle de ne pas se marier, et c’est la raison pour laquelle la loi reconnaît les familles en dehors du mariage et va progressivement reconnaître les enfants de ces familles. Le mariage, qui a réussi à se détacher du sacrement, va en effet se détacher également d’un ordre social fondé sur une conception patriarcale de la société (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC), conception qui fait du mari et du père le propriétaire, le possesseur du patrimoine, bien entendu, mais aussi de l’épouse et des enfants.
Cette évolution du mariage et du divorce, qui permettra dorénavant aux couples de choisir librement l’organisation de leur vie, sera inscrite dans la loi parce que, depuis deux siècles, l’institution du mariage connaît une évolution vers l’égalité, et c’est bien ce que nous sommes en train de faire aujourd’hui : parachever l’évolution vers l’égalité de cette institution… (fin de l’extrait 1)
Plusieurs députés du groupe UMP. Rien à voir !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
née avec la laïcisation de la société et du mariage. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.)
Cette évolution va concerner d’abord les femmes, avec la suppression de la référence au chef de famille, la reconnaissance de la communauté de vie, la loi de 1970 puis celle de 1975, qui va réintroduire le consentement mutuel. La reconnaissance des droits des femmes sera inscrite progressivement dans la loi. L’année 1970, c’était il y a à peine une quarantaine d’années, c’est-à-dire que vivent encore aujourd’hui des femmes qui ont eu besoin de l’autorisation de leur époux pour ouvrir un compte bancaire, souscrire un contrat, disposer de leur salaire et donc être reconnue comme sujet de droit.
(Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Hors sujet !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Cette évolution vers l’égalité, qui va moderniser notre institution du mariage en reconnaissant la femme comme sujet de droit, va reconnaître aussi progressivement les droits des enfants. Par la loi de 1972, le législateur cessera d’établir une différence entre les enfants légitimes et les enfants naturels. Il procédera donc à une refonte de la filiation, de façon à reconnaître une égalité des droits pour les enfants, que leur filiation soit légitime ou naturelle.
En 2000, c’est un arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme, l’arrêt Mazurek, qui contraindra la France à mettre un terme aux discriminations imposées aux enfants adultérins, et c’est seulement par une ordonnance de 2005, ratifiée par une loi de 2009, que les notions d’enfant légitime et d’enfant naturel vont disparaître de notre code civil. L’enfant devient donc également un sujet de droit.
En vous présentant aujourd’hui ce projet de loi, qui contient des dispositions ouvrant le mariage et l’adoption à droit constant aux couples homosexuels, le Gouvernement choisit de permettre aux couples de même sexe d’entrer dans cette institution et de composer une famille comme les couples hétérosexuels, soit par une union de fait, que l’on appelle le concubinage, soit par un contrat, le PACS, soit par le mariage. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.)
C’est bien cette institution que le Gouvernement a décidé d’ouvrir aux couples de même sexe.
M. Jacques Myard. Il a tort !
………………………………………………………………………………………………..
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
C’est un acte d’égalité. (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.)
M. Marc Laffineur. Et l’enfant ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Il s’agit du mariage tel qu’il est institué actuellement dans notre code civil. Il ne s’agit pas d’un mariage au rabais, il ne s’agit pas d’une union civile…
M. Jean-Luc Reitzer. C’est dommage !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
prétendument aménagée. Il ne s’agit pas non plus d’une ruse, d’une entourloupe (« Si ! » sur les bancs du groupe UMP.), il s’agit du mariage en tant que contrat entre deux personnes (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR), en tant qu’institution produisant des règles d’ordre public.
Oui, c’est bien le mariage, avec toute sa charge symbolique et toutes ses règles d’ordre public, que le Gouvernement ouvre aux couples de même sexe, dans les mêmes conditions d’âge et de consentement de la part de chacun des conjoints, avec les mêmes interdits, les mêmes prohibitions, sur l’inceste, sur la polygamie, avec les mêmes obligations d’assistance, de fidélité (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP), de respect, instaurées par la loi de 2006, avec les mêmes obligations pour chaque conjoint vis-à-vis l’un de l’autre, les mêmes devoirs des enfants vis-à-vis de leurs parents et des parents vis-à-vis de leurs enfants.
Oui, c’est bien ce mariage que nous ouvrons aux couples de même sexe. Que l’on nous explique pourquoi deux personnes qui se sont rencontrées, qui se sont aimées (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),…
M. Lucien Degauchy. On va pleurer !
M. Philippe Meunier. Sortez les violons !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
…qui ont vieilli ensemble devraient consentir à la précarité, à une fragilité, voire à une injustice, du seul fait que la loi ne leur reconnaît pas les mêmes droits qu’à un autre couple aussi stable qui a choisi de construire sa vie.
M. Yves Fromion. Il faut supprimer le divorce, dans ce cas!
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Qu’est-ce que le mariage homosexuel va enlever aux couples hétérosexuels ? (« Rien ! » et applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR. – Exclamations sur de nombreux bancs du groupes UMP.) S’il n’enlève rien, nous allons oser poser des mots sur des sentiments et des comportements. Nous allons oser parler de mensonges à l’occasion de cette campagne de panique (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), sur la pseudo-suppression des mots de « père » et de « mère » du code civil et du livret de famille. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Philippe Meunier. Scandaleux !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Nous posons les mots et nous parlons d’hypocrisie pour ceux qui refusent de voir ces familles homoparentales et ces enfants, exposés aux aléas de la vie. Nous posons les mots et nous parlons d’égoïsme pour ceux qui s’imaginent qu’une institution de la République pourrait être réservée à une catégorie de citoyens. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR. - Protestations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Un député du groupe UMP. C’est ce qui s’appelle un amalgame !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Nous disons que le mariage ouvert aux couples de même sexe illustre bien la devise de la République. Il illustre la liberté de se choisir, la liberté de décider de vivre ensemble.
M. Yves Fromion. Et la liberté des enfants d’avoir un père et une mère ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Nous proclamons par ce texte l’égalité de tous les couples, de toutes les familles.
M. Pierre Lequiller. Et les enfants ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Enfin, nous disons aussi qu’il y a dans cet acte une démarche de fraternité, parce qu’aucune différence ne peut servir de prétexte à des discriminations d’État. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. S’il vous plaît, chers collègues ! Écoutez les arguments de Mme la garde des sceaux. Vous aurez l’occasion de vous exprimer par la suite.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Au nom d’un prétendu droit à l’enfant (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)
M. Yves Fromion. Ce n’est pas un « prétendu » droit !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
qui n’existe pas, vous protestez parce que le mariage et l’adoption sont ouverts aux couples de même sexe dans exactement les mêmes conditions que pour les couples hétérosexuels. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.) Autrement dit, ou bien vous nous affirmez que les couples hétérosexuels ont un droit à l’enfant…
M. André Schneider. Ils les font !
M. Yves Fromion. C’est le droit naturel !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
…inscrit dans le code civil, ou bien ce droit à l’enfant n’existe pas – et de fait il n’existe pas – et les couples homosexuels auront le droit d’adopter dans les mêmes conditions que les couples hétérosexuels. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.)
Au nom d’un prétendu droit à l’enfant (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),
M. André Schneider. Arrêtez avec votre « prétendu » !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
…vous refusez des droits à des enfants que vous choisissez de ne pas voir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Le texte que nous vous présentons n’a rien de contraire à la Convention internationale des droits de l’enfant.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Au contraire, il protège des enfants que vous refusez de voir. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Les couples homosexuels pourront adopter dans les mêmes conditions que les couples hétérosexuels,…
M. Xavier Breton. La condition d’être père et mère ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
…selon les mêmes procédures : l’agrément sera accordé dans les mêmes conditions par les conseils généraux, l’adoption prononcée dans les mêmes conditions par le juge, conformément à l’article 353 du code civil,…
M. Hervé Mariton. Ce n’est pas trop démontré !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
qui dispose que l’adoption est prononcée si elle est conforme aux droits de l’enfant. Par conséquent, vos objections n’ont pas de fondement (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), si ce n’est une réelle difficulté à inclure dans vos représentations la légitimité de ces couples de même sexe. Or vos enfants et petits-enfants les incluent déjà et les incluront de plus en plus. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.) Et vous serez bien mal à l’aise lorsque, par curiosité, ils liront les comptes rendus de nos débats ! (Mêmes mouvements. –Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Nous avons donc décidé d’ouvrir le mariage et l’adoption aux couples de même sexe. Le mariage, comme je l’ai montré références historiques et juridiques à l’appui, a été une institution de propriété puisqu’il a d’abord servi à marier des patrimoines, des héritages et des lignées.
M. Yves Fromion. Vous réécrivez l’histoire !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Il a été une institution de possession puisque le mari et père avait une autorité absolue sur l’épouse et les enfants. Il a été une institution d’exclusion, nous l’avons vu : le mariage civil a mis un terme à l’exclusion des croyants non catholiques et de certaines professions, donc de toute une série de citoyens. Ce mariage, qui a été une institution d’exclusion, va enfin devenir, par l’inclusion des couples de même sexe, une institution universelle. Enfin, le mariage devient une institution universelle !
Vous pouvez continuer à refuser de voir, à refuser de regarder autour de vous, à refuser de tolérer la présence, y compris près de vous, y compris, peut-être, dans vos familles, de couples homosexuels. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. André Schneider. C’est quoi, le débat, pour vous ?
M. Claude Bartolone. S’il vous plaît !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Vous pouvez conserver le regard obstinément rivé sur le passé (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),…
M. Philippe Meunier. C’est vous qui êtes dépassés !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
…et encore, en regardant bien le passé, y trouverez-vous des traces durables de la reconnaissance officielle, y compris par l’Église, de couples homosexuels. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Vous avez choisi de protester contre la reconnaissance des droits de ces couples ; c’est votre affaire. Nous, nous sommes fiers de ce que nous faisons. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.)
M. Lucien Degauchy. Ah oui, il y a de quoi !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Nous en sommes si fiers que je voudrais le définir par les mots du poète Léon-Gontran Damas : l’acte que nous allons accomplir est « beau comme une rose dont la tour Eiffel assiégée à l’aube voit s’épanouir enfin les pétales ». Il est « grand comme un besoin de changer d’air ».
Plusieurs députés du groupe UMP. Ridicule ! C’est à pleurer !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.
Il est « fort comme le cri aigu d’un accent dans la nuit longue ».
(Les députés des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR se lèvent et applaudissent longuement. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mme Laurence Dumont. Une grande ministre pour une grande cause !



Questions :

1 - Quel est l’argument principal avancé par Christiane Taubira pour défendre le mariage pour tous ?

2 – En vous inspirant de ce discours historique, et en tenant compte du contexte taïwanais, présentez votre position sur le « mariage pour tous » de manière argumentée, en discutant les arguments contraires (et sans oublier introduction, conclusion, et exemples précis)

Le retentissement de la légalisation du mariage homosexuel dans le Monde :
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/05/17/a-taiwan-le-parlement-legalise-le-mariage-homosexuel-une-premiere-en-asie_5463235_3210.html